CdC #2 : Flaubert

Avez-vous déjà remarqué ce genre de personne qui semble vomir par plaisir un dictionnaire du 18e siècle ou même avoir appris les mots les plus compliqués de la langue ? De base, je dois l’avouer, j’étais partie pour parler des Grammar Nazi. Cependant, en poussant ma réflexion plus loin et puisque je me pose toujours trente mille questions à la minute, j’ai remarqué qu’il était plus sage de parler des Flaubert en puissance avant de parler des Grammar. Pourquoi ? Sans doute parce que les deux sont souvent liés n’en déplaise à ceux qui pourraient éventuellement se reconnaître.


Déjà avant d’aller trop loin dans les propos, laissez-moi le temps de définir un Flaubert et surtout pourquoi ce nom. Pourquoi pas Voltaire, Zola, Stendhal, Maupassant, Baudelaire ou Camus. Bref des grands noms de notre littérature française, aussi incontournable que la Tour Eiffel pour les touristes. La raison est très simple : il n’est pas le dernier pour employer des mots complexes. Il suffit de regarder son ouvrage Education Sentimentale pour remarquer que toutes les pages possèdent des annotations. J’aurais pu les nommer les Zola mais ce n’est pas tant les dix pages ou les deux mille mots de description qui alourdissent un récit. Maupassant est plus soporifique qu’autre chose. Camus est perché, Voltaire est… philosophe ça suffit et Baudelaire est l’auteur des Fleurs du Mal et puisque je connais que ça de lui et que c’est de la poésie... Disons que je ne lui en veux pas de sortir des mots complexes pour les rimes.


Maintenant que j’ai posé le tableau, il est temps de savoir comment et où émerge ce genre de comportement. La majorité dira que c’est par des lectures voire des études. Que posséder un haut degré de vocabulaire est une marque d’intelligence ! Oui. Je suis d’accord dans le fond. Je fais moi-même partie de cette dernière catégorie d’apprenant par les études. Entre le vocabulaire des cathédrales (paix à mon âme, c’est magnifique, mais c’est chiant), les différentes méthodes de peintures, sculptures, les noms d’artistes, les mouvements… Le vocabulaire de l’histoire de l’art c’est un calvaire d’apprentissage, surtout pour retenir. Mais je digresse ! Je reviens à nos moutons. Je viens d’expliquer le « comment » maintenant le « où ». Je vais faire très simple : partout. Qu’ils soient sur les forums, les conversations entre amis, le boulot. Il y aura toujours une personne pour vous rappeler qu’il parle mieux la France que vous.


Je ne sais pas vous, mais moi j’adore apprendre de nouveaux mots. Cela enrichit mon vocabulaire, mais j’ai horreur de devoir garder à côté de moi un dictionnaire ou lire des notes de bas de page quand un terme m’échappe. En plus de casser le rythme de ma lecture, ça casse aussi mon immersion. Comme lorsqu’on apprend à conduire et qu’on ne sait pas utiliser l’embrayage. On s’arrête, on avance, on s’arrête, on avance… Puis on cale. Que du bonheur.


Il faut se dire que tout le monde n’a pas le même vocabulaire car tout le monde ne lit pas, n’écrit pas ou n’a pas eu tout simplement la même éducation. Mais il y a une grande différence entre placer des mots jolis et synonymes pour éviter d’être redondant et se faire une séance de masturbation d’égo. Car souvent, et j’ai pu le constater sans le vouloir en étant seulement spectatrice dans un interforum récemment, les Flaubert aiment particulièrement donner des conseils de bienséance de la langue française en te pondant un pavé sur ta façon d’écrire. Avec un certain ton morgue voulut ou pas qui frise l’encastrement dans un mur. L’intérêt peut être présent si la personne de l’autre côté a demandé un avis ou une interprétation de ses propos. C’est à ce moment-là que j’ai remarqué l’ambivalence entre Grammar et Flaubert. Ils te disent que ça ce n’est pas bon car tu paraphrases, tu fais des pléonasmes et te corriges systématiquement. Mais même si je sais que le but de ces rassemblements d’interfo sont de donner un classement à la fin, il n’est pas vraiment question de juger comme un pseudo-critique littéraire. Surtout quand l’accent est mis sur l’amusement avant la compétition. Faut savoir, on s’amuse ou on se fight à coup de pavé dans les gencives ?


Mais vu que la majorité du temps il est plus simple de parler avec des exemples, je vais en donner un simple que tout le monde va comprendre. Ou pas, c’est un peu le but de ne rien comprendre à ce qui va suivre… Mis à part des calés dans le domaine, même les Flaubert ne vont pas piper un mot. Bienvenue au club. J’illustre : « Le Parthénon d’Athènes se place sur un ténémos, ce temple est plus imposant qu’important. Il repose même sur un préparthénon. Extérieurement, le temple est construit avec un crépis à trois degrés et repose sur un stylobate où se dresse un péristasis dorique de 8 sur 17. Les colonnes sont cannelées sur leurs fûts, ses architraves sont lisses. Sa frise est faite de métopes ornées et de trigyphes avec des corniches canoniques. Ses frontons représentent deux scènes importantes de la mythologie. Le pronaos est plus petit que la moyenne car c’est le naos qui compense. Son sékos cependant est inhabituel et autour se dresse des colonnes en Pi qui entoure une statue en chryséléphantine de douze mètres. L’intérieur est orné d’une frise représentant les Panathénées. Il possède également un opisthodome et un parthénon. »


Prenez un mouchoir et séchez-vous les yeux, il y a du sang qui coule. Oui, je vous l’accorde, ça fait très mal quand on ne pipe pas un mot. Alors Flaubert, on se sent comment ? Vous comprenez enfin ce qui nous traverse maintenant ? Mettez-vous à notre place. Autre temps, autres mœurs certes. Là c’est carrément autre époque parfois. Un texte est fait pour être partagé. Maintenant, plus le langage sera soutenu et dégoulinant de mots qu'on sort tous les trente-six du mois et moins les gens vont comprendre. À part certains. Mais là, tout dépend le public qu'on vise. Bon allez, je suis bon prince comme on dit. On passe ça à travers Google Translate ou plus connu sous le nom de dictionnaire de l'histoire de l'art et ça donne : « Le Parthénon d’Athènes se place sur un terrain sacré, ce temple est plus imposant qu’important. Il repose même sur un ancien temple détruit quelque temps avant. Extérieurement, le temple est construit avec trois marches. Sur la dernière repose une galerie de colonnes possédant l’ordre le plus lisse et dépouillé qui entoure le temple et compte huit colonnes devant et dix-sept sur les côtés. Ses dernières sont ornées de sillons sur la partie entre la base et le haut de la colonne, ses linteaux sont lisses. Sa frise est faite de supposées parties lisses qui sont cette fois ornées et ce dernier possède trois rainures avec des corniches simples. Son ornement triangulaire représente deux scènes importantes de la mythologie. L’entrée du temple est plus petite que la moyenne, car c’est la demeure du dieu qui compense. Sa partie fermée cependant est inhabituel et autour se dressent des colonnes en « U » qui entoure une statue construite avec des armatures de bois et plaquée d'ivoire et d’or de douze mètres. L’intérieur est orné d’une frise représentant une fête religieuse importante. Il possède également un cul-de-sac semblable à l’entrée et un lieu de réunion. »


Respirez c’est passé ! D’une vingtaine de mots très simples à comprendre avec le vocabulaire de la personne qui les emplois, moi, je sais ce que je raconte. Logique quand tu nous tiens ! Cependant, dès qu’il est question de passer à un vocabulaire plus simple (j’ai mis plus de temps à faire le second texte que le premier j’avoue), on passe la barre des cinquante mots. Mais au moins, tout le monde a compris. 


Vous voyez, c'est pas compliqué les Flaubert. Courage !


Oxymore
Présentation de l'auteur.e :
“ En étude dans l'archéologie et l'histoire de l'art, ça déterre autant les morts que les vivants, avec la précision d'une bibliographie longue comme le bras. Oxy est comme son pseudo, une contradiction humaine. Tel le clair obscur, elle est plutôt obscure et pas claire. Le café, ça ne la réussi pas. Sa présence dans le projet s'est faite au détour d'une conversation et d'un désir, non dissimulé, de renouveau. Abandonnant pour un temps le monde du RPG, XOOGGE et son immense grise ont bien voulu d'elle. C'est ainsi qu'elle est devenue rédactrice ”

Nos derniers articles Voir tout

Concours d’écriture : été 2020

“ Il se demanda soudain pourquoi il n’était pas resté avec le reste du groupe. On l’avait poussé à faire un choix qui n’était pas forcément le sien... ” Voici le premier concours d’écriture sur XOOGGE. Après avoir passé pas ma...
Le 27/07/2020 à 18:18 • Nevyin
#Concours #Écriture #Été

Le RPG doit-il être payant ?

L’idée est insensée. Le RPG en ligne est une activité gratuite, sauf exception, et il est difficile d’imaginer une soudaine monétisation alors que la communauté s’en est toujours sortie sans. La commercialisation du RPG impliquerait égale...
Le 13/07/2020 à 18:38 • Kim
#RPG #Payant #Don #Réflexion

Approfondir votre personnage

Au fil de mes pérégrinations rpgiques, j’ai mis en place quelques astuces pour mieux découvrir mes personnages. Car non, la fiche de présentation n’est pas le seul moyen de bien le connaître, bien au contraire ! Certain·e·s rpgistes - et j...
Le 29/06/2020 à 20:08 • jojofeels
#rpg #article #écriture

Commentaires

LouAinsel
Le 11/08/2020 à 18:04
Bonjour.

Pour être tout a fait honnête, j'ai vraiment du mal avec cet article (mais j'avais aussi du mal avec l'overbooké). Je ne vois pas la portée humoristique ou second-degré qui était alors annoncé par le teaser "La Chronique des Clichés" qui annonçait plus des chroniques sur les clichés de personnages avec occasionnellement des profils de joueurs, que l'inverse. Là, j'ai l'impression que je lit des leçons de morales et du jugement. C'est très malaisant. Et dans cet article, j'ai aussi une sensation de "je règle mes comptes/embrouille en publique" car bon, citer le dernier interforum sans redonner le contexte et avec des informations erronées, je trouve que ça manque d’honnêteté. D'autant qu'un espace débat a été ouvert à tous sur le forum porteur de la neuvième édition sur le sujet des commentaires de texte.

Critiquer les pavés de ceux qui commentent de façon "pseudo-littéraire" des textes écrit dans le cadre d'un concours -certes amicale mais un concours- et écrit dans une zone réservée aux commentaires et avis : c'est moyen. D'autant que si, il est vrai, certains use d'un français soutenu dans leurs explications, c'est car ils ont le droit de nommer un chat, un felis silvestris catus s'ils le veulent. Cela n'est pas obligé de plaire au plus grand nombre j'en conviens, mais on ne peut pas plaire à tout le monde.

Par contre, je tique sur la phrase "Ils te disent que ça ce n’est pas bon car tu paraphrases, tu fais des pléonasmes et te corriges systématiquement." .... j'ai lu tous les fameux pavés que vous décriez (car ce paragraphe d'où est tiré la phrase que je cite est dédié aux commentateurs de l'interforum ou tout du moins, c'est ainsi que je le perçois) ... et pas un seul ne corrige le joueur dont il commente l'écriture ou ne lui dit ce qu'il aurait du faire. Il y avait bien un gramarnazi qui a souligné les fautes de concordance de temps, mais ceux qui ont parlé de litote, paraphrase etc l'ont fait en disant en quoi cet usage les a impacté en bien ou en mal dans leur interprétation de l'écrit.

Et même en dehors de ce passage assez troublant qui met en avant un concours où vous avez été spectatrice, j'aimerai vraiment savoir en quoi ces chroniques sont à portée satyrique et humoristique. Aussi bien l'overbooké que le flaubert. Car je ne dis pas, ces deux profils existent. Et il existe des moyens d'en parler de façon drôle et légère. Je me souviens d'un blog qui traitait avec justesse et drôlerie des gramarnazi, faux dyslexique etc. Mais ici, je ressens du jugement. Le "Conseil à Overbooké : ne procrastine jamais." ou encore le "Vous voyez, c'est pas compliqué les Flaubert. Courage !" ... Ce sont des phrases qui disent "je n'ai pas écrit ça en étant satyrique mais en étant véridique : je vous juge."

Là est mon ressenti sur cette série d'article, je préférais être honnête. Je ne pense pas lire les prochains articles qui seront fait sur les clichés mais au moins, j'aurais dit pourquoi je ne les lirais pas.

Bonne journée à vous.
Respectueusement, Lou.
Avatar aléatoire
Pazou
Le 11/08/2020 à 23:54
Hello,
Je suis assez perplexe : est-ce que ce que cet article est censé faire rire ? Dans le genre second degré, ironie, tout ça ?
Si c’est le cas, je suis passée totalement à côté. Et je ne pense pas être la seule. C’est plutôt du genre agressif comme humour. Décapant, au moins.
Comme je suis incapable de dire si cet article est juste “pour rire” ou s’il s’agit d’une vraie critique envers ces Flauberts qui utilisent des mots “trop compliqués”, je ne partirai pas dans un long plaidoyer à base de “écrivez comme vous voulez” (même si j’en ai eu très envie).
J'aimerais juste revenir sur l’exemple de l’Interforum, parce que dans ce paragraphe-là s’il y avait de l’humour il est vraiment bien caché. Pour ceux qui ne le savent pas et que ça intéresse (les autres, désolée pour le spam), l’interfo est une rencontre entre différents forums RP dont le coeur est un concours, bon enfant, qui oppose des champions désignés par chaque forum sur des épreuves à thème et durée imposés. Ensuite tout le monde vote pour élire les textes qu’ils ont préféré et ceux qui le souhaitent commentent les épreuves ou les textes proposés. C’est fun, c’est enrichissant, moi j’adore.
Alors oui, j’essaie honteusement de vous vendre le truc, pour que vous ne pensiez pas après avoir lu cet article que venir participer à l’Interforum, c’est risquer de vous prendre une brique sur la tronche. Ce n’est pas le cas. Oui, les textes présentés aux épreuves peuvent être commentés, mais en restant le plus constructif possible et sans jugement de valeur. Et non, les commentateurs ne sont pas des pervers sadiques (je sais on aurait pourtant dit comme ça).
Voilà, c’était pour remettre la balle au centre.
Ciao.
Identifie-toi pour poster un commentaire
Screenshots par Robothumb